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« On meurt de prétendre à l’idée avant d’avoir été aux choses. ».
Charles Ferdinand Ramuz.
Elégante proposition de Charles Ferdinand Ramuz.
Prétendre, laisser croire que la personne concernée a accédé à un étage supérieur sans avoir pris l’escalier ni l’ascenseur. Rien de plus facile que d’avoir une idée, autrement plus difficile de vivre les choses, celles qui font de soi un être expérimenté. C’est pourtant en se frottant aux choses de la vie qu’une idée, une philosophie pourquoi pas un sens moral émergent dans l’esprit qui aura su « allé aux choses ».
Un proverbe chinois dit : «Il est vain de tirer sur une plante, en espérant la faire pousser plus vite. ». Se donner du temps, ne pas brûler les étapes. Adolescent, jeune homme, adulte j’ai enfilé les idées comme des perles. Je me suis cogné, blessé rarement mais j’ai eu ma dose d’écorchures et de bosses. Comme tout un chacun, je me suis levé tous les matins pour aller aux choses, certes des idées me trottaient dans la tête mais le soir quelque peu étourdi par ma journée, elles avaient disparu. Pas définitivement, je n’avais qu’à les prendre au moment où elles se présentaient au risque de les perdre une nouvelle fois. Tout en continuant à labourer les choses, on m’expliquait que de toute façon j’avais tout le temps devant moi. Il est vrai qu’à vingt ans on se dit qu’il reste encore une quarantaine d’années pour accéder à un âge où il ne sera plus certain de posséder des idées. Cela parait démesurément long et de se dire qu’il y a tout le temps pour transformer une idée en place forte. Mais attention, pendant ces quarante années, les choses vous accaparent et les idées deviennent orphelines.
Mourir de prétendre à l’idée ce qui est différent de mourir pour une idée, sans avoir expérimenté les choses de la vie est une fin triste et ridicule. Mais l’inverse est tout aussi risible : mourir d’avoir été aux choses avant même de prétendre à l’idée.
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