« Il n’est pas interdit de boire du vin pour augmenter son être. »

Gaston Bachelard.

« Non je ne suis pas rien. Je suis tellement plus que cela, mon corps est trop petit. Si je suis né, c’est pour exister en grand ! » Alors nous tirons sur nos membres, nous nous mettons en équilibre instable sur les pointes de nos pieds, nous tendons l’oreille vers le plus éloigné des sons, nous écartons les deux pans noirs de l’horizon. Parce que nous n’en pouvons plus de nous trouver entre les murs de notre chambre, de notre champ, de notre usine, de notre bureau. Nous sommes des êtres de science-fiction qui tirons derrière nous des valises sur roulettes pleines de rêves; repassés, pliés nous les portons car ils nous augmentent. Nous ne manquons pas de change car nous ne cessons pas de rêver aux rêves d’autrefois et de demain. Ils sont nos désirs et contribuent à nous rendre plus grands, à multiplier nos jambes et nos têtes. Ce qui importe, ne pas rester immobile, seulement portés par le vent. Faire de nous un individu libéré de son corps. Il existe des substances dangereuses, elles entrainent vers une perte définitive. Poussés par le besoin d’être autrement, nombreux basculent dans l’éblouissement au bout d’une cigarette, d’une seringue ou d’un verre. C’est ainsi qu’ils occupent la totalité de l’univers qui ne cesse d’augmenter dans la tête jusqu’à la dispersion finale de la petite créature qu’ils sont. Et ne seront plus.

Mais tout simplement, « il n’est pas interdit de boire du vin pour augmenter son être. ». Je lève mon verre à la vigne qui me permet de quitter mon corps momentanément. Après quelques verres je suis lascif, modestement plus grand mais sans volonté de l’être davantage.

Une fois couché sur mon lit, je vois le plafond tourner, tourner et j’implore Gaston de me permettre de faire.