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« Les poètes écrivent lorsqu’ils sentent que, dans leur vie, il va faire mauvais temps. »
Alexis Gloaguen, La chambre de veille.
Non, le poète n’est pas un baromètre ni une grenouille qui grimperait sur une échelle quand le mauvais temps s’annonce. A l’approche de l’orage, il ne rejoint pas le groupe des hirondelles quand elles volent bas au-dessus des maisons en poussant des cris aigus. Il ne se rallie pas au troupeau rassemblé sous l’arbre quand il pleut. Le poète ne se sent jamais menacé et ce n’est pas le mauvais temps qui va l’intimider. Monsieur Gloaguen je ne suis pas d’accord avec vous.
Les poètes emportent une affection qui n’est pas sujette aux intempéries : la mélancolie. Sa caractéristique première est de changer de couleur en fonction du temps. Ce n’est que cela parce qu’à dire vrai, le poète écrit tout le temps et sous tous les temps. Rien ne peut l’arrêter. Je ne dis pas que certains trouvent davantage leur inspiration en automne ou sous un soleil de plomb. L’épiderme du poète est particulièrement sensible donc ses réactions peuvent surprendre. Je n’ai pas connu de poètes car ils réussissent toujours à se dissimuler dans un coin. Il suffit qu’ils se sentent recherchés pour se rendre invisibles. Comme on ne les voit jamais, on les imagine plus nombreux qu’ils ne le sont. C’est bien connu, la terre est peuplée d’êtres mystérieux, lutins infernaux et petites sirènes enjôleuses. Rien de tel pour que le poète s’y dissimule. Clandestin au milieu de toutes ces créatures, il aiguise son chant. Quelquefois il pousse des cris. Jamais fatigué, son métier est d’écrire de la poésie, qu’importent les intempéries. La poésie, c’est le vrombissement intérieur qui assourdi sa vie.
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