T 16

« Tout le travail de l’homme est pour sa bouche, mais son âme n’en sera pas rempli. »

L’Ecclésiaste.

Nourritures terrestres. Nourritures spirituelles.

Se nourrir, action nécessaire pour vivre. Boire aussi, de l’eau, du vin. Ce n’est pas le propre de l’homme, tous les êtres vivants, animaux et plantes, le visible et l’invisible, l’immensément petit et l’immensément grand se nourrissent. Nous vivons dans un univers de mastication entouré de montagnes de déjection. Nous sommes des boudins par où transitent les aliments et si nous n’étions que cela, il n’y aurait pas de nourriture spirituelle possible.

Il semblerait que nous possédions l’exclusivité de ce genre de nourriture qualifiée de spirituelle alors que rien ne la constitue, ni solide ni liquide.

Par exemple la méditation que je ne pratique pas serait un acte spirituel qui nourrit l’esprit et le cœur. L’âme est encore une autre source d’élévation ou de désespoir que l’on découvre comme un timbre-poste collé sur notre enveloppe corporelle. Je comprends qu’il est nécessaire de la nourrir, de lui parler et s’efforcer d’écouter la rumeur qu’elle émet le jour et la nuit.

« Tout le travail de l’homme est pour sa bouche, mais son âme n’en sera pas rempli. » L’Ecclésiaste.

Dans le silence, l’âme devient un compagnon de route. Je veux parler du silence apaisé des choses qui bruissent. Je veux dire aussi combien la musique est un silence habité. Je m’y déplace comme si je possédais une grande maison avec plusieurs étages. L’écouter c’est ouvrir portes et fenêtres, les refermer derrière soi mais pas toujours, monter les étages, s’assoir en tailleur sur la partie supérieure du toit, redescendre les escaliers, se glisser par la petite porte qui ouvre sur la cave et pourquoi pas remonter les étages en courant puis souffler quelques instants dans le grenier.

C’est de cette façon que je nourris mon âme ou ce qui lui ressemblerait. Mais il y en a beaucoup d’autres :

Marcher sur le sentier côtier en regardant la mer.

Se perdre sous la canopée de la forêt.

Pénétrer dans une église éclairée uniquement des rayons du soleil après avoir franchi les vitraux par effraction.

Tenir un enfant par la main.

Observer la beauté et les gestes élégants que souvent les femmes ont en partage.

Lire René Char, me trouver devant une page blanche et à nouveau devant une autre page blanche.

Ecrire un mot, une phrase, un paragraphe peut-être puis l’effacer comme si tout cela n’avait jamais existé.

Se perdre encore dans le tintinnabulement des jours… .

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