Sur la plage.

L’homme d’une quarantaine d’année se tient debout au milieu de la plage. Il porte une casquette rose, de sa main droite il frappe un seau jaune avec une petite pelle en plastique de couleur verte. Il tapote sur le seau pour le vider du sable qu’il contient. Mais une fois le seau vidé, il continue à tapoter sur l’objet en le retournant régulièrement pour s’assurer qu’il est bien vide. Curieusement il continue son geste alors que plus rien ne tombe du seau. Tout seul il réussit à couvrir le brouhaha de la plage, rire des enfants, fracas des vagues car c’est marée haute. Personne ne l’informe que le seau est vide, lui-même ne semble pas le voir bien qu’il le retourne régulièrement en glissant l’autre main à l’intérieur.

Il continue encore et encore. Bientôt dix-huit heure, de gros nuages menaçant s’accumulent au-dessus de la plage. Naturellement les vacanciers changent de maillot, roulent leurs serviettes de bain, pressent sans ménagement les jeunes enfants et se précipitent vers les voitures ou les vélos garés en face du parking.

L’homme désormais seul continue de taper sur son seau.

Juste avant que la nuit tombe, deux gendarmes s’approchent de l’individu au milieu de la plage.

« Cher Monsieur, il faut rentrer chez vous. Vous allez prendre froid. »

L’individu ne répond pas, ne porte aucune attention à leur présence et poursuit ses gestes frénétiques.

« Si c’est pour faire venir la pluie » remarque un gendarme « ce n’est pas nécessaire, ici elle vient toute seule. ».

L’homme reste muet.

Les gendarmes embarrassés n’ont aucun raison de le verbaliser, l’homme n’est pas en infraction. Ils se retirent en lui faisant de nouvelles recommandations.

Le lendemain est une journée de grande marée, l’amplitude est une des plus importantes de l’année.

L’homme qui ne cessait de taper sur son seau a été emporté. On ne l’a jamais retrouvé.

Quelques mois plus tard, un petit garçon pauvre, de l’autre côté de l’atlantique a ramassé sur la plage un seau jaune et une pelle verte. Les couleurs avaient un peu passé. Il s’est assis et à l’aide de son seau et de sa pelle il a érigé un énorme tas de sable qu’il a modelé en tortue géante. Très heureux devant sa créature, le petit garçon a dansé autour de la tortue tout en frappant le seau.

Mais un jour la tortue est rentrée dans la mer pour aller pondre ses œufs, très loin de l’autre côté de l’atlantique.

Le petit garçon a grandi mais avec sa vieille pelle verte il frappe le seau jaune en le retournant régulièrement pour le vider bien qu’il n’y ait plus rien à l’intérieur.

Le jeune homme porte toujours une casquette rose.

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