« En mes escris mesmes, je ne retrouve pas toujours l’air de ma première imagination : je ne sçay ce que j’ay voulu dire et m’eschaudé souvent à corriger et y mettre un nouveau sens, pour avoir perdu le premier qui valloit mieux. » Montaigne, Les Essais.

T 26

« Je suis aveugle et ne sais où aller

De mon bâton, pour ne pas me perdre

Je vais sondant mon chemin çà et là 

Quelle pitié que je sois forcé d’être

L’homme égaré qui ne sait où il va. »

Charles d’Orléans, Poésies.

« C’est d’être sur terre qui n’est pas admissible. ». déclare Eugène Ionesco dans « Présent Passé » avant d’exprimer son incompréhension de notre finitude.

24

« Mozart et Schubert, à la fin de leur vie, ont su pareillement atteindre à cette sagesse où l’expérience ultime paraît tendre la main à l’enfance intacte. »

Harry Halbreich.

C’est ce qu’écrit le musicologue à propos de Gabriel Fauré et plus précisément de la Sonate n°2 pour violon et piano en mi mineur.

T 23

« Je ne sais pas encore lire. Je suis au cinéma du quartier avec ma mère et une de ses amies, je prends le programme et je demande : « Si je regarde longtemps, longtemps, est-ce que je comprendrai les lettres et les mots ? »

Ionesco, Présent, Passé.

T 22

« Se souvenir, ce n’est pas comme raisonner, faire route dans l’espace mental ; c’est la croissance de l’espace lui-même. »

Ortega Y Gasset.

T 21

« La résurrection est une chose toute naturelle, il n’est pas plus étonnant de naitre deux fois qu’une. »
Strindberg, Inferno.

Je ne suis pas insensible aux miracles.
La Bible est un livre surprenant. Une fois écartées les chroniques violentes de l’Ancien Testament, nous sommes confrontés à la révélation des miracles. Ce sont les charnières du récit, ils martèlent la foi comme les coups assénés par le forgeron. A coups de miracles, des histoires nous sont racontées. Concevoir un miracle, c’est refuser la mort. Imaginer des gestes et des scènes proches de l’absurde revient à nous prolonger au-delà du temps naturel qui nous est imparti.

Je ne crois pas aux miracles.
Ils nous entrainent dans des pêches miraculeuses, nous font spectateurs de la multiplication des pains, nous émeuvent quand l’aveugle soudainement retrouve la vue et nous étonnent de voir Jésus marcher sur l’eau en restant au sec.
Les miracles sont les récits de la mauvaise foi, c’est en cela qu’ils sont plaisants. Chacun d’entre nous invente le sien, aussitôt oublié, emporté par le vent. Le plus souvent se préparer au miracle commence par un vœu. Faire un vœu quand on déguste la première fraise de l’année, faire un vœu si le pari tenu est réussi, faire un vœu au pied d’un arc en ciel… . Mille vœux ouvrent les portes des miracles, il suffit de savoir regarder et écouter. Je les aime quand ils ressemblent à des vérités auxquelles rien ne peut être opposé. Par exemple August Strindberg écrit dans « Inferno » que « La résurrection est une chose toute naturelle, il n’est pas plus étonnant de naitre deux fois qu’une. »
Comme il ne serait pas surprenant de ne pas naitre du tout mais qui pourrait en témoigner ? Poussons la réflexion jusqu’à l’absurde, quel est le nombre de résurrections possibles inscrit dans nos gènes ? Si une seule naissance nous est autorisée et la possibilité de mourir qu’une seule fois alors l’unique moyen de lutter contre l’ennui de vivre, est d’imaginer des miracles. A coups de baguette magique nous pourrions bouleverser l’organisation du monde, construire des arches de Noé, s’asseoir devant la mer et l’ouvrir en deux pour permettre à notre errance de progresser. A chacun son miracle et d’attendre patiemment sa venue.
Pour ma part je n’attends rien de miraculeux. Habité par la nostalgie des paradis perdus, le miracle se situe loin devant moi. Un miracle ne se produit jamais dans notre dos.

T 20

« Mais que faire, Messieurs si la destinée unique de tout homme intelligent est de bavarder, c’est-à-dire verser de l’eau dans un tamis. »
Dostoievski, Le sous-sol.

Dostoïevski écrit dans « Le sous-sol » que bavarder revient à verser de l’eau dans un tamis. Il précise que

T 19

« Je ne suis pas moi-même le maitre de ma vie, je suis un fil de plus à tisser dans le vulgaire calicot de la vie ! Fort bien, mais si je ne sais pas tisser, je peux du moins trancher le fil. »…. »

Kierkegaard.

A nouveau Kierkegaard.

Trois voyelles donnent au mot « calicot » la sonorité d’un ruisseau qui s’écoule

« Hélas ! La porte du bonheur ne s’ouvre pas vers l’intérieur, de sorte qu’on puisse la forcer d’un coup d’épaule. Elle s’ouvre au-dehors, aussi n’y a-t-il rien à faire. »

Kierkegaard.

Je me souviens de mon voyage à Taïwan, un déplacement plutôt, d’une durée-éclair de trois jours comme tous ces voyages professionnels